Histoire, Enjeux du Non-Remboursement et Impératif de la Relance
Introduction : Le Paradoxe Congolais
La dette publique de la République Démocratique du Congo (RDC) présente un paradoxe. En 2022, la dette totale représentait seulement 10,56 % du PIB, un niveau jugé faible et soutenable. Mais derrière cette apparente solidité, la crise de liquidité structurelle liée aux arriérés budgétaires intérieurs révèle une fragilité inquiétante.
Contrairement à d’autres pays où la dette extérieure est le principal problème, en RDC ce sont les dettes intérieures – constituées d’engagements non honorés envers les fournisseurs, entrepreneurs et banques locales – qui paralysent l’économie.
I. Histoire et Origines de la Dette Intérieure
I.1. L’Hégémonie de la Dette Extérieure
Sous le régime Mobutu, la dette extérieure a explosé, alimentée par des projets inefficaces et des pratiques de corruption. Incapable de payer, le pays a dû restructurer à plusieurs reprises sa dette auprès du Club de Paris (1976, 1977, 1979, 1981, 1983, 1985, 1986, 1987 et 1989).
Au début des années 2000, la RDC s’est engagée dans l’initiative PPTE, avec l’appui du FMI et de la Banque Mondiale, permettant l’assainissement partiel de la dette extérieure.
I.2. L’Accumulation des Arriérés Intérieurs
Pendant que l’attention était tournée vers la dette extérieure, la dette intérieure a été négligée. Les paiements aux entreprises locales ont été suspendus, entraînant une accumulation massive d’arriérés. L’État a transformé les entreprises en « banques forcées », immobilisant leur capital.
I.3. Chiffres Clés (2022)
- Encours de la dette intérieure : 3,840,54 millions USD (6,48 % du PIB)
- Arriérés budgétaires : 3,72 milliards USD (5,7 % du PIB)
- Titres négociables : 222,73 millions USD seulement
II. Enjeux Cruciaux : Effets sur le Secteur Privé
II.1. Asphyxie des Entreprises
Les entreprises, principales détentrices de créances, subissent un manque de liquidité. Le non-paiement de l’État bloque leurs investissements et met en péril leur survie.
II.2. Débat Économique
| Mécanisme | Effet | Pertinence en RDC |
|---|---|---|
| Approfondissement financier | Positif (développement du marché des titres) | Faible, marché limité (<3 %) |
| Lazy Banking / Effet d’éviction | Négatif (banques préfèrent financer l’État) | Fort, aggravé par la dollarisation |
| Arriérés budgétaires | Négatif (asphyxie du secteur privé) | Très fort |
II.3. Impact sur la Croissance
Le non-remboursement crée une « taxe cachée » sur le capital privé. Il freine la croissance, réduit les recettes fiscales et mine la confiance des investisseurs.
III. Plaidoyer des Acteurs Privés : Le Cas Mokia
III.1. Légitimité
Des entrepreneurs comme Gabriel Mokia exigent le remboursement de leurs créances. Le non-respect des engagements de l’État mine la sécurité juridique et la confiance des investisseurs.
III.2. Remboursement = Catalyseur
Le paiement des arriérés libère immédiatement la trésorerie des entreprises, permettant :
- Le règlement de leurs dettes
- L’accès au crédit bancaire
- Le financement de nouveaux investissements
IV. Stratégies d’Apurement des Arriérés
IV.1. Engagement de l’État
La DGDP et le Ministère des Finances ont lancé une stratégie d’apurement visant à réduire les discriminations entre créanciers extérieurs et intérieurs.
IV.2. Options de Traitement
| Option | Avantage | Risque |
|---|---|---|
| Décote forte & paiement rapide | Liquidité immédiate | Perte permanente de capital |
| Décote faible & étalement long | Préserve le capital | Risque de non-respect des échéances |
| Conversion en titres | Liquidité via marché secondaire | Dépend de la profondeur du marché |
Conclusion et Recommandations
La dette intérieure est un goulot d’étranglement économique. Sans règlement rapide, elle bloque la croissance et détruit la crédibilité de l’État.
Recommandations stratégiques :
- Court terme : Accélérer la liquidation des arriérés certifiés.
- Moyen terme : Renforcer le marché des titres publics.
- Long terme : Instaurer une discipline budgétaire stricte.
En libérant le secteur privé, la RDC peut transformer sa dette intérieure d’un fardeau en un levier de croissance.
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